Portrait par Giovanni Boldini (1914)
Portrait par Giovanni Boldini (1908)
Photo d'Adolph de Meyer (1912)
J’ai choisi de vous présenter un personnage qui fera écho à certaines figures dont j’ai déjà parlé ici (Ernesta Stern, Gabriele d’Annunzio, la Princesse de Polignac…).
Quelques mots pour tenter de la décrire : excentrique, excessive, espèce de dandy féminin, muse, mondaine. Elle souhaitait être « une œuvre d’art vivante ». Elle vécut quelques années à Venise au début du 20e siècle (1910-1914). C’est par Ernesta Stern que la marquise Luisa Casati apprend qu’un palais sur le Grand Canal allait bientôt se libérer. Ce palais momentanément loué par la comtesse de la Baume-Pluvinel pour héberger ses amis, n’était autre que le palazzo Venier dei Leoni, aussi surnommé il palazzo Non Finito.
La Casati l’achète en 1910 et en sera propriétaire jusqu’en 1924. Elle le fera complètement rénover ainsi que le jardin qui accueillera une véritable ménagerie (pour ne pas dire carrément un zoo!) : on pouvait y rencontrer des oiseaux exotiques (perroquets, merles albinos, paons blancs, deux guépards qu’elle promenait en gondole et au bout d’une laisse incrustée de pierres précieuses sur la Piazza, des lévriers, des singes, des serpents…
Une chose est certaine, elle ne passait pas inaperçue. Elle alla même un jour jusqu’à faire repeindre sa gondole en blanc, «crime» pour lequel les contrevenants étaient jadis condamnés à la prison ou aux galères!
Une muse
Elle aura inspiré plusieurs artistes du début du 20e siècle : des peintres (Giovanni Boldini, Van Dongen, Romaine Brooks, Marinetti, Fortunato Depero, Umberto Boccioni, Alberto Martini, Augustus John…), des photographes (Man Ray, Cecil Beaton, Adolph de Meyer…), des sculpteurs (Giacomo Balla, Jacob Epstein) ainsi que des couturiers et créateurs de bijoux (Fortuny, Léon Bakst, Paul Poiret, Erté, Lalique, Cartier…). Elle aura également inspiré quelques personnages à d’Annunzio (notamment Coré), Maurice Druon (La Volupté d'être), Tennesse Williams, Jack Kerouac.
« Dès août-septembre 1909 – année da la première saison de ses ballets –, Diaghilev revient à Venise, où il s’installe au Grand Hôtel des Bains, qui avait ouvert trois ans plus tôt et deviendra son établissement préféré; il y retrouvera Nijinski et Bakst. Cette fois, ce sera le temps des visites à l’Accademia, à la scuola di San Rocco, mais aussi des mondanités, avec Isadora Duncan ou la marquise Casati, qui , dès son arrivée à Venise, la même année, avait commencé de multiplier les soirées – souvent ordenancées par Bakst –, manants et éclairée a giorno par des esclaves dont on ne pouvait dire qu’ils étaient nus puisque leur corps avaient été recouvert d’or, ou bien en son Palazzo Venier dei Leoni, où un pianiste vêtu seulement d’un turban de brocart et d’un pagne de lamé jouait dans un salon traversé par des panthères et des léopards fort drogués. Cette alliance de plaisirs dut pleinement satisfaire Diaghilev, car on le revit durant les étés 1910 (année de la création de Shéhérazade et de L’Oiseau de feu, ainsi que du Bal persan chez la marquise Casati) – avec Nijinski et Benois –, 1911 (année de Petrouchka et du Lac des cygnes, ainsi que du Bal Longhi chez la marquise Casati), […] L’année 1913 – celle précisément du Sacre du printemps, ainsi que du Bal des Mille et unes Nuits chez la marquise Casati […]» (p. 359-360 Un Carnet vénitien de G.-J. Salvy)
Sa vie, les grandes lignes :
1881 : Naissance de Luisa Amman à Milan.
1900 : Mariage avec le marquis Camillo Casati Stampa di Soncino (1877-1946), séparation légale en 1914.
1901: Naissance de leur fille, Cristina
1903: Rencontre avec Gabriele d’Annunzio qui sera son amant.
1914 : Achat du Palazzo Venier dei Leoni
1923 : Achat du Palais Rose au Vésinet (ancienne demeure de l’écrivain et esthète Robert de Montesquiou)
1957 : Mort de Luisa Casati à Londres. À la fin de sa vie, elle avait cumulé une dette de 25 millions de dollars.
Pour en savoir plus:
À lire: Infinite Variety: The Life and Legend of the Marchesa Casati, de Scot D. Ryersson et Michael Orlando Yaccarino, University of Minnesota Press, 2004 (1999).
Ce livre existe en français sous le titre de: La Casati : Les Multiples vies de la Marquise Luisa Casati aux éditions Assouline (2003)
Des mêmes auteurs: The Marchesa Casati: Portraits of a Muse (2009)
Vous retracez le portrait d'une femme libre et la faites revivre à travers vos images et votre texte. Venise lui a permis cette liberté.
RépondreSupprimerAnne
Anne: Il y a longtemps que cette femme m'intriguait. J'ai eu beaucoup de plaisir à lire cette biographie mais je dois avouer que je ne fais que l'effleurer dans cette présentation. Portrait à creuser davantage.
RépondreSupprimerBonne soirée!
Voici un portrait passionnant.
RépondreSupprimerMerci beaucoup de nous avoir entrouvert les coulisses de cette marquise pour le moins excentrique.
Gros bisous et bonne journée.
Je ne connaissais pas, un personnage assurément, merci pour le lien.
RépondreSupprimerMiss Lemon.
Quel personnage hors du commun et combien d'artistes elle a fascinés.
RépondreSupprimerMerci pour ce portrait qui nous donne envie d'en connaître davantage sur elle et sur les oeuvres qu'elle a inspirées.
Bonne semaine.
Do
j'ai un portrait d'elle dans mon bureau. Maintenant, je peux lire sa vie. Merci. En plus, ma trisaïeule était marquise, vivait au xixème siècle et était vénitienne, donc, ça ne peut que me toucher.
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